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Couleur Lauragais : les journaux

Histoire

Le Pape Pie VII à Villefranche de Lauragais en 1814

Au cours de ses recherches généalogiques, Jean-Pierre Bouteille a trouvé dans sa bibliothèque familiale, mentionné par l’un de ses ancêtres sur un livre de prières, le passage du Pape Pie VII à Villefranche de Lauragais le 2 février 1814. Il était de retour à Rome après avoir été retenu captif quelques temps à Fontainebleau par Napoléon 1er.
Jean-Pierre Bouteille suppose que cette annotation a été faite par son arrière-arrière-arrière-arrière grand père, Bernard Marty, qui habitait à l’entrée de Villefranche.


Le Pape Pie VII

Voici ce qu’il a écrit (certains mots sont écrits en occitan quand le mot français ne lui venait pas) :
Le 2 février 1814 à quatre heures du soir, Notre Saint Père le pape Pie VII est passé à Villefranche de Lauragais, venant de Toulouse dans une superbe voiture à six chevaux. Il y avait deux autres voitures à quatre chevaux «oustoints»1, plusieurs cardinaux, des prêtres et officiers de sa maison. Il s’est arrêté davant la porte pour changer de chevaux, a donné la bénédiction à tous ceux qui se sont présentés et béni des livres, bagues qu’on lui a montré. Il est toujours resté en voiture, il faisait très froid, il n’a été ouvert que la portière du côté de la «quissou»2 vis à vis la porte. Il allait à Rome, son nom est Barnabé Kiaramonti, né à Ceserre dans la Romagne le 14 août 1742, cardinal en avril 1785, élu Pape à Venise le 14 mars 1800 (on le retrouve rapporté dans l’almanach de Toulouse comme Saint).
Pie VII. Bernané Chiaramonti, né à Cezerre dans la Romagne le 14 aoust 1742. Cardinal en avril 1785, élection à Venise le 14 mars 1800. Installation le 21 du même mois. Le 2 février 1814, jour de la purification ; sa Sainteté fut couchée à Alzonne.

1. Vient de l’occitan « ostent » se dit en parlant d’un cheval : caval ostent «  cheval bégu »
Cet adjectif est en relation avec la forme de la machoire du cheval, malformation en quelque sorte qui trompe sur l’âge du cheval, un peu péjoratif….La voiture du Pape à de beaux chevaux et les deux autres voitures ont des chevaux moins beaux peut-être vieux.
2. Vient de l’occitan quiston quémandeur, issu du verbe quistar quémander et quista (qui se prononce quistou) quête, quémande.
Il fait froid, donc on ouvre que la porte par laquelle les gens viennent quémander au Pape la bénédiction, peut-être une petite porte aménagée côté Pape, à cet effet.
Ecrire peut-être : du côté de la quémande (terme probablement exact mais désuet…. évidemment), ou de la quête (plus compréhensibles mais non exactement exact). (explications : Lucien Ariès).
Un peu d’histoire - Luigi Barnaba Chiara-monti, né le 14 août 1742 à Cesena (Romagne) et mort le 20 août 1823 à Rome, était un moine bénédictin, issu d’une famille de vieille noblesse d'origine française. Elu Pape le 14 mars 1800, il prendra le nom de Pie VII.

Texte officiel venue du Pape Pie VII

Face à l’histoire globale, Pie VII et son prédécesseur Pie VI (qui totalisent à eux seuls 47 ans de règne) se trouvent à la charnière entre l’Ancien Régime et l’éclosion d’un monde nouveau, industriel. C’est la fin de la lutte entre le Pape et l’Empereur, initiée au Moyen Âge et c’est l’Empereur (le pouvoir civil) qui, malgré la résistance désespérée des pontifes du XIXème siècle, va s’imposer.

Face à l’histoire de l’Église catholique, Pie VII n’a pas laissé de traces majeures. Quoique très pieux, il n’a guère entrepris de réformes doctrinales et ses écrits théologiques sont rares, voire inexistants.
C’est plutôt par sa personne elle-même que Pie VII a marqué son temps :
- Pacifique : comme évêque, il fera tout pour éviter les révoltes contre l’envahisseur et toute la violence qui l’aurait accompagnée. Au général Radet venu l’arrêter, il demande si aucun sang n’a été versé, puis, rassuré, il le suit. À aucun moment de sa captivité, il n’incitera les catholiques à une résistance violente et ne se départira jamais d'une absolue neutralité dans les conflits armés de son époque. Une fois rentré à Rome en 1814, aidé d’Ercole Consalvi, il développera une intense activité diplomatique visant notamment à encourager la coexistence pacifique entre les États européens et les religions.
- Humble : Pie VII luttera longtemps, à la fin du conclave, contre l’idée d’être choisi. Sa discrétion en matière doctrinale procède sans doute de la même modestie. Lors de sa captivité à Fontainebleau, il insiste pour laver et repriser lui-même sa soutane.
- Honnête : contrairement aux habitudes de népotisme de nombre de ses prédécesseurs, Pie VII veillera toujours à ne favoriser en rien les membres de sa famille.
- Sa dimension intellectuelle : l’humble Pie VII est en réalité un brillant intellectuel aux intérêts très variés. Polyglotte, traducteur remarquable et excellente plume, Pie VII a consacré de nombreuses années de sa vie à lire, à étudier et à enseigner.
- Son action politique : en rétablissant les jésuites, Pie VII réhabilite un Ordre intellectuel et progressiste. En combattant l’esclavage, il est en avance d’un siècle sur son temps et ne se fait pas que des amis parmi les autres monarques européens. En établissant à Rome la liberté de commerce, en tissant des relations diplomatiques avec la Russie, l’Angleterre, les États-Unis, des pays non catholiques, en réorganisant les écoles dans les États Pontificaux et en y abolissant la féodalité, Pie VII est résolument un pape du progrès inspiré des Lumières.
- Son action culturelle : pendant toute sa vie monastique, dom Gregorio tentera de rénover l’idéal monastique de son ordre et travaillera à y moderniser l’enseignement. Une fois devenu pape, il travaillera à mettre en valeur le passé antique de Rome et d’embellir la ville. Il créera un musée consacré à l’Antiquité, créera ou fera rouvrir des écoles et fera enrichir considérablement la Bibliothèque vaticane. Il invitera aussi à Rome de nombreux artistes sans distinction de provenance ou de religion, ce qui témoigne, vu l’époque et sa fonction, d’une grande ouverture d’esprit.
- Son humanité : totalement dénué d’ambition personnelle, ami fidèle, sobre (il avouait vivre d’un écu par jour), pieux, doux (jamais il n’élevait la voix), discret, modeste, généreux (il dépense tous ses revenus d'évêque à soulager les pauvres de son diocèse), ferme au point de risquer sa vie pour défendre ses convictions (sa résistance à Napoléon est à cet égard exemplaire).

En 1823, affaibli par son grand âge, Pie VII se déplaçait de plus en plus difficilement. Dans la nuit du 6 au 7 juillet, 14 ans jour pour jour après son enlèvement par le général Radet, le pape voulut se lever de son fauteuil en s’appuyant sur son bureau, mais ses forces le trahirent et il tomba lourdement sur le sol de marbre, se fracturant le col du fémur de la jambe gauche. Le 20 août, alors qu’il venait d’entrer dans sa 81ème année, Pie VII rendit son dernier souffle à son fidèle Ercole Consalvi et son âme à Dieu après un règne de 23 ans, cinq mois et six jours.
Le successeur de Pie VII sera le pape Léon XII.


Le passage du pape dans la région a revêtu, à l’époque, une certaine importance car il est mentionné et gravé au fronton d’un bâtiment de Saint Jory, dans le nord de Toulouse “Ici, le 2 février 1814, revenant de Fontainebleau, SS le pape Pie VII s’arrêta devant Toulouse venue à sa rencontre, bénit le clergé, les séminaires, la foule immense et s’écria que la foi est grande en France”.

Documentation :
- Wikipedia
- Manuscrit adressé à Couleur Lauragais par Jean-Pierre Bouteille, Pechbonnieu



Couleur Lauragais n°128 - Décembre 2010/Janvier 2011