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Couleur Lauragais : les journaux

Au fil de l'eau

Cent ans de vidanges du barrage-réservoir de Saint-Ferréol

En cette fin janvier 2005, alors que la remise en eau du barrage-réservoir de Saint-Ferréol se fait progressivement pour atteindre sa côte (32,5 m de hauteur) et son volume maximum (6 370 000 m3 environ) dans quelques semaines ; reprenons l’histoire des vidanges, des principaux travaux et du barrage dans son ensemble.

Coupe et élévation des voutes et maison de Saint Ferriol

Vidanges et travaux
Après avoir vu ce qui s’y est déroulé durant le XXème siècle dans le précédent numéro de Couleur Lauragais (rappels : 1904, 1934, 1964, 1972, 1981, 1994 et 2004), voyons les vidanges et travaux importants au XIXème siècle. L’année 1828 a connu une vidange totale et le remplacement des robinets servant à quantifier les besoins en eau pour l’alimentation du Canal du Midi. Après la vidange de 1831, la "chambre" des robinets et le remplacement de ceux-ci, à nouveau (il y en a trois), a été reconstruite en 1845. Rappelons que ces immenses robinets boisseaux (comme ceux d’un tonneau) sont en bronze, et que les gros tuyaux qui vont chercher l’eau à l’avant de la partie immergée du grand mur ont une longueur de 10 à 12 m. Autre vidange totale en 1851. En 1853 est construite la voûte (acqueduc) immergée à l’intérieur du barrage, de la vanne supérieure de la Badorque. Les années 1866 voient une vidange totale et 1869 une vidange partielle. Terminons ce XIXème siècle par les vidanges de 1880 et 1889. Des travaux de rejointement et d’étanchéité ont été effectués à chacune de ces opérations de mise à sec du barrage, ainsi que le remplacement des vannes en bois par des vannes métalliques.
Ne quittons pas ce XIXème siècle, sans reparler succintement des aménagements paysagers faits à la fin de ce siècle-là (voir CL n°54 juillet/août 2004).


La gerbe de St Ferréol

Crédit photo : Couleur Média

Le parc et ses magnifiques allées, enserrant le plan d’eau, l’ensemble d’une superficie de 90 hectares, avec ses multiples essences d’arbres, ses pinèdes… En contre-bas du barrage, couronné par le mur aval (construit par Vauban vers 1686) avec l’entrée des voûtes accessibles, les belles cascades et la "superbe gerbe" (jet d’eau) qui fonctionne naturellement, par la pression de l’eau contenue dans le barrage.

Dessins en coupe des galeries,
mur et vannes
du barrage-réservoir de Saint Ferréol

Construction de l’ouvrage
Ce barrage-masse est composé d’une digue (grand mur) de près de 800 m de longueur, de 32,50 m de hauteur et de 140 mètres d’épaisseur environ ; pour une capacité totale de 6 500 000 mètres cubes et une superficie de 67 hectares lorqu’il est plein. Cette digue est elle-même composée de trois murailles :
- Le mur amont qui est immergé dans les eaux, de 60 m de long, de 19,50 m de haut et de 3,90 m d’é-paisseur, sur lequel est érigée une colonne appelée pyramide de 21 m de hauteur ; elle était utilisée pour mesurer la hauteur de l’eau, donc le volume, d’un seul "coup d’œil". Elle fut construite en 1769 et est graduée en toises et en pieds.
- Le mur central, ou grand mur d’une longueur de 786 m et de 32,50 m de hauteur (au point le plus bas dans le lit de la rivière) avec une épaisseur de plus de 12 m dans sa partie basse et de 1 m dans sa partie haute. Il est couronné par une margelle et une belle allée promenade au sommet.
- Le mur aval ou mur des voûtes, de 80 m de long, haut de 29,25 m et de 2,80 m d’épaisseur.

Entre ces trois murailles distantes d’environ 65 m ont été tassés des remblais d’enrochement et des terres argileuses. Elles sont reliées par quatres galeries souterraines, deux immergées en amont (accessibles uniquement dans les vidanges du barrage) et deux sèches en aval. A l’intérieur de ces voûtes se trouvent les mécanismes, vannes et "robinets" (occultés aujourd’hui) de distribution et quantification de l’eau nécessaire à l’alimentation du Canal, ainsi qu’à la vidange du réservoir.
Ces galeries sont superposées et ont des fonctions bien distinctes. A l’amont, nous avons dans la partie inférieure la "voûte de l’enfer" et dans la partie supérieure la "voûte du tambour". A l’aval en bas, nous avons la "voûte de vidange" et au-dessus la "voûte des robinets". Ces deux dernières sont accessibles pour la commande des vieux robinets à boisseaux, l’ancien système et de la vanne "papillon" en service aujourd’hui, automatisée.
D’autres vannes dites de la "Badorque" et de trop plein, permettent également la régulation de l’eau à différents niveaux et alimentent les belles cascades dans le parc d’agrément.


Travaux de réparations sur l'étanchéité
des robinets. Au premier plan, un corps
de robinet à boisseaux
Crédit photo : Denis Estève
Une canalisation partant de l’intérieur du barrage alimente la fameuse gerbe ou jet d’eau d’une vingtaine de mètres de hauteur.
L’ensemble du réservoir est alimenté par le lit du Laudot, grossi des eaux, des rivières du versant méditerranéen, elles-mêmes déversées aux Cammazes par le passage de la Rigole de la Montagne dans la "Voûte de Vauban" (aqueduc souterrain de 122 m de longueur et de 3 m de largeur).



La vanne de vidange dans la voûte de l'enfer,
au niveau de l'ancien lit du Laudot
Crédit photo : Denis Estève

Un petit canal appelé "Rigole de ceinture", contourne par le sud-est le réservoir de Saint-Ferréol et permet de neutraliser l’entrée de l’eau dans celui-ci. L’ensemble se rejoignant en aval du barrage jusqu’à l’ancienne écluse des Thomasses. Cette dernière constitue le point de jonction avec la Rigole de la plaine venant de Revel et amenant les eaux du Sor par la dérivation du Pont-Crouzet (entre Revel et Durfort). A la dérivation du Laudot (point de jonction) le débit des eaux est quantifié et mesuré avant l’arrivée à Naurouze (environ 30 kms de là) point de partage naturel, à 189 mètres d’altitude. Ces eaux alimentent alors le Canal du Midi, dont les besoins sont d’environ 20 à 25 millions de mètres cubes annuellement.



Les poissons noyés
dans la boue

Crédit photos :
Denis Estève



Mise à sec du Bassin
Années 1934 - 1935
Les pêcheurs vont tirer la "Senne"

Crédit photo : Collection J. Batigne

 



La récupération du poisson
(carpes, gardons, tanches, brochets, truites…)

Crédit photos : Denis Estève
 
Mise à sec du barrage réservoir
Saint-Ferréol
en 2004

Crédit photos :
J. Batigne

La petite Histoire du Bassin…Lac…de Saint-Ferréol
Ce site unique, "…miroir d’eau inséré dans un écrin de verdure…" comme se plaisait à le dire notre ami Bernard Blancotte, a une particularité géographique et administrative bien particulière…?
En effet il est situé à cheval sur deux régions : Midi-Pyrénées et Languedoc-Roussillon ; trois départements : l’Aude, la Haute-Garonne et le Tarn ; quatre communes : Revel et Vaudreuille (dans le 31), Sorèze (dans le 81) et Les Brunels (dans le 11).
Le propriétaire, c’est l’Etat ! Comme l’ensemble des canaux du Midi, des Rigoles d’alimentations et autres barrages (le Lampy chez nous), l’ensemble étant classé au Patrimoine Mondial de l’UNESCO (United Nations Edu-cational Scientific and Cultural Organisation). Sa gestion est assurée par le Service de la Navigation (dépendant du Ministère des Transports) devenu il y a une quinzaine d’années un Etablissement Public d’Etat, sous le joli nom de Voies Navigables de France.

Jacques BATIGNE

À voir une exposition résumant en photos, cartes postales et dessins, les vidanges du XXème siècle, à l’Office de Tourisme de Revel-Saint-Ferréol-Montagne Noire présentée par l’auteur (à partir du 11 janvier 2005)


Couleur Lauragais n°70 - Mars 2005