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Couleur Lauragais : les journaux

Au fil de l'eau

Sur les pas de Riquet
En parcourant la Montagne Noire

Couleur Lauragais vous a déjà invités au fil de ses numéros à parcourir les chemins de service ou de halage qui bordent les rigoles d’alimentation du Canal du Midi, "sur les pas de Riquet" ; celle dite de la "Montagne" dans la Montagne Noire et celle dite de la "Plaine" dans la plaine du Lauragais. Des balades, randonnées pédestres ou cyclistes fort agréables que nous vous conseillons de programmer durant vos vacances estivales.
Toujours sur ce thème "des pas ou traces" de Pierre-Paul Riquet, nous vous proposons aujourd’hui de suivre comme axe de référence ce "fil de l’eau", mais en élargissant de part et d’autre, aux villes et villages, aux sites, monuments et curiosités à voir le long de ces cours d’eau artificiels et quelques fois naturels. A visiter en circuits auto ... et accompagnés, afin de les faire découvrir au plus grand nombre...
Le mot "tourisme" ne devait certainement pas exister au XVIIème siècle ! Riquet, génial "inventeur" du Canal Royal de Languedoc, qui a imaginé et réalisé ce travail gigantesque, n’avait jamais pensé qu’un jour des touristes puissent à loisirs parcourir ces belles régions. Il l’avait fait lui-même avec le fontainier revélois Pierre Campmas chargé de l’alimentation en eau de la bastide de Revel.

Sur la vallée de l'Alzeau
Dans cette première partie, nous vous invitons à nous suivre, sur les "Pas de Riquet" au départ des "Sources du Canal", de la Prise d’Alzeau jusqu’au réservoir de Saint-Ferréol.
Pour commencer votre visite, rejoignez le village de Lacombe (dans l’Aude) par Saissac et Saint Denis, route qui ouvre sur la région du Cabardès ; ou bien, retrouvez ce site historique par la route de Sorèze et Arfons (dans le Tarn). Ce petit village de moyenne montagne, à l’altitude de 720 m, se trouve entre les belles forêts de la Loubatière et celle de Ramondens. Elles sont séparées par la rivière Alzeau, qui fait également frontière entre les deux départements. Vous y trouverez le hameau de la Galaube avec ses anciens moulins à eau et forges (martinets). En amont, un barrage vient d’être mis en eau fin 2002, construit par l’Institution Interdépartementale de l’Aménagement Hydraulique de la Montagne Noire. Il est formé par une digue masse à enrochement
(((((à masque étanche) ancré sur le lit de l’Alzeau. Construit avec les matériaux rocheux pris sur place, il a une retenue de
8 000 000 de m3 et une surface de 65 ha (voir CL n°31, avril 2001). Très bien intégré dans son environnement forestier, un aménagement paysager est en cours de création. Un point important à signaler, en aval et au-dessus du pont de la galaube, sur la rive droite de la rivière se trouvent les traces de la "Rigole d’Essai", que Riquet avait fait creuser en 1665. Il voulait ainsi prouver aux experts royaux dépêchés sur place par Colbert, que les eaux de la Montagne Noire pouvaient bien, après captage, être acheminées par un système de rigoles jusqu’à Naurouze (il existe un fléchage et un panneau explicatif). Toujours en aval du pont, mais sur la rive gauche, prenez le chemin de terre qui mène au site historique de la Prise d’Alzeau (à moins d’un km).


La prise d'AlzeauLe barrage de la Galaube
Crédit photo : J. Batigne
Crédit photo : IIAHMN

Là, vous trouverez le premier captage des eaux, par une chaussée qui barre la rivière point de départ du système alimentaire du Canal. Une stèle s’y trouve, gravée sur la pierre elle rappelle toute l’histoire de la construction du Canal. Elle a été érigée en 1837, par le Duc de Riquet de Caraman (voir CL n°4, juillet/août 1998). Avec une maison de style forestier, ancienne habitation du "garde du canal" de ce poste très important au départ de la Rigole de la Montagne. C’est un site d’une réelle beauté qui s’offre à notre regard avec des arbres majestueux dont un épicéa plus que centenaire (voir CL n°13, juin 1999). C’est d’ici, en empruntant le chemin de service qui serpente en suivant le cours d’eau de la rigole, que vous pouvez faire une très belle promenade pédestre ou cycliste. Mais n’oubliez pas que votre auto (ou bus) vous attend sur le parking des deux restaurants de la Galaube. Par la route, allez rejoindre le barrage-réservoir du Lampy ; autre lieu historique, puisque construit au XVIIIème siècle (1783), ce réservoir supplémentaire d’alimentation en eau, à une contenance de 1 760 000 m3 pour une superficie de 40 ha, retenu par une digue en granit de 137 m de long ancrée sur la rivière le Lampy. Ce plan d’eau en pleine forêt est un lieu privilégié de calme et de fraîcheur, à 650 m d’altitude. A voir absolument, un splendide arborétum avec des parcours ludiques sur le thème des Fables de la Fontaine.
La visite de la petite et magnifique cité de Saissac s’impose. C’est un gros bourg fortifié, avec son imposant château du XIVème siècle, ses anciens remparts avec tours et portes, ses vieilles demeures, accrochés sur ce piton rocheux ; l’église ancienne et un musée sont à visiter. Ce village, véritable balcon sur la plaine Carcassonnaise, offre un magnifique panorama sur toute la chaîne des Pyrénées.
Au départ à égale distance (environ 5 km), se trouve Arfons ; un village rural de moyenne montagne (662 m d’altitude) dont les toits et les murs des maisons côté pluie sont recouverts d’ardoises. Ici, existait du XIIème au XVIème siècles une Commanderie des Hospitaliers de St Jean de Jérusalem, ainsi que de vieilles demeures d’anciens verriers.

Rejoignez à nouveau Saissac, pour retrouver la RN 629 et empruntez-la (en direction de Revel) jusqu’au village des Cammazes, à l’altitude de 610 m. Ne manquez pas à l’entrée de celui-ci (la route passe dessus) la célèbre "percée". En réalité, il s’agit d’un aqueduc souterrain, construit sous Vauban vers 1686. Remarquable ouvrage de 122 m de long, qui permet à l’eau de la Rigole de la Montagne, sur le versant de la vallée du Sor de venir grossir le débit du ruisseau Le Laudot qui se trouve dans la vallée opposée et alimente le barrage de Saint-Ferréol.
Le barrage des Cammazes
Crédit photo : IIAHMN

Sur la vallée du Sor
A voir, un important autre barrage construit celui-ci en 1958, ancré sur le Sor, avec une retenue d’eau de 19 000 000 m3, pour une superficie de 90 ha. Il est constitué par une muraille en béton de 70 m de hauteur.

Le Sor à Durfort Durfort
Crédit photo : Couleur Media
Crédit photo : Couleur Media


Au départ du village, une petite route (actuellement fermée pour cause d’éboulements) descend en virages serrés, surplombant les gorges de la Vallée du Sor et de Malamort. Elle débouche sur le village de Durfort à l’altitude de 260 m. Ce village est renommée pour son artisanat et ses chaudronneries. Ici on travaille le cuivre depuis des siècles, la célèbre dinanderie : ustensiles de cuisine et autres objets décoratifs. Des forges existent encore sur le lit de la rivière, où les "martinets" fonctionnent avec l’énergie de l’eau. A voir, le musée du cuivre et les nombreuses boutiques.

A quelques 2 km de là, la ville de Sorèze, toujours dans le Tarn vous accueillera.
Ici se trouve un patrimoine exceptionnel avec la célèbre Abbaye-Ecole (classée monument historique). Cette Abbaye bénédictine dispensa l’enseignement dès le XVIIème siècle. Elle devient école royale militaire sous le Roi Louis XVI (1776-1793). Le Père Dominicain Lacordaire dirigea l’école au milieu du XIXème siècle. Le clocher Saint Martin du XVIème siècle (ancienne église paroissiale) et les vieilles maisons à colombages et encorbellements (XVIème et XVIIème siècles) sont à voir dans les rues de la cité ancienne.
L'Abbaye-école de Sorèze
Crédit photo : Collection Communauté de Communes Lauragais Revel et Sorèzois

Sur la vallée du Laudot
Quittez cette vallée du Sor, élément important dans le système hydrogéologique de l’alimentation du Canal et retrouvez la Vallée du Laudot, en empruntant la D85, où vous retrouverez un élément primordial de ce système hydraulique, le barrage-réservoir de Saint Ferréol. Construit sur les ordres de Riquet de 1667 à 1672, il est le premier et le plus important ouvrage de ce type jamais réalisé jusque là, véritable prouesse techniques au XVIIème siècle. Riquet fût aidé dans cette tâche gigantesque par le Chevalier de Clerville, éminent technicien, commissaire général des fortifications. Un peu plus tard vers 1686, après la mort de Riquet, c’est Vauban qui, comme beaucoup d’autres ouvrages sur le Canal, va parachever l’imposante digue. Rappellons quelques chiffres de ce barrage-réservoir qui a une capacité de 6 500 000 m3, réserve d’eau retenue par une digue-masse de 786 m de longueur, pour une hauteur de 35 m, dans sa partie la plus profonde. L’épaisseur de cette digue composée de trois murailles, est de 149 m ; elle est ancrée sur le lit du Laudot, dans sa partie rocheuse la plus ressérée. Le plan d’eau a une superficie de 67 ha (voir CL n°7, novembre 1998).


Le barrage de St Ferréol

A la fin du XIXème et au début du XXème siècles, un parc paysager de 90 ha a été aménagé tout autour de ce lac, avec des allées ombragées de très nombreuses essences d’arbres et arbustes, un jet d’eau, appelé gerbe, des cascades, ainsi que des installations sportives de plein air. Ce qui fit, il y a plus de cent ans et qui fait encore de nos jours un lieu touristique très prisé. Avec ses multiples sports nautiques, ses fêtes et ses promenades dans un site champêtre et de fraîcheur unique, une hôtellerie de qualité, ainsi que des gîtes et campings vous accueilleront.
Pour conclure cette première partie, je reprends une citation de mon ami Bernard Blancotte, qui parle du lac de Saint-Ferréol : "... Incomparable miroir d’eau inséré dans un écrin de verdure...".


Le lac de St Ferréol
Crédit photo : Collection Communauté de Communes Lauragais Revel et Sorèze


Vous pourrez poursuivre cette balade depuis Revel jusqu’à Naurouze dans le prochain numéro de Couleur Lauragais.

Jacques BATIGNE

Couleur Lauragais n°64 - Juillet - Août 2004