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Couleur Lauragais : les journaux

Gens d'ici

Alain Jauzon, portrait d'un passionné de culture et de musique occitane

Champenois d'origine, Alain Jauzon est installé à Revel depuis quelques années. Passionné depuis son enfance par l'histoire et la musique, il a toujours essayé, au travers de ses activités, de mettre en valeur cette culture qu'il a adoptée.


Instrument de musique du XIème siècle

Des passions éclectiques
Alain vit avant tout au travers de plusieurs passions éclectiques qui ont construit sa vie. D'abord sportif, il pratique surtout des sports pour lesquels la capacité de concentration est très importante : Kun-Fu, Taï Chi, tir à l'arc. Il essaye toujours d'associer à ces différents sports une dimension spirituelle. C'est également un fervent musicien et il a pratiqué la guitare sèche pendant plus de 17 ans. Mais c'est aussi et surtout un passionné d'histoire et plus particulièrement d'histoire médiévale. Une passion qui lui vient sans doute de sa région d'origine, la Champagne, berceau des rois de France sacrés à Reims.


Alain Jauzon
(Crédit photo : Couleur Média)


Il y a quelques années, Alain est employé dans une usine textile de Castres et décide de s'installer à Revel. Il commence d'abord par lire tout ce qu'il peut trouver sur notre histoire locale et apprend ainsi à découvrir notre riche passé occitan. Il visite aussi tous les châteaux et autres monuments nombreux en Lauragais. C'est lors de ces différentes visites qu'il se rend compte du manque d'entretien de notre patrimoine historique. Ainsi, en 1990, il souhaite mettre en lumière la culture occitane et réalise pour cela un marathon depuis les châteaux cathares ariégeois (en partant de Foix) jusqu'à Massaguel. Quatre jours de course à pieds, fortement médiatisées, qui vont lui permettre de faire passer son message pour la restauration des châteaux cathares.

Deux passions conjuguées : histoire et musique
Mais Alain réunit en fait ses deux passions (musique et histoire) lorsqu'il présente la musique occitane. En passant sur un petit marché de la région, il découvre un vendeur qui propose des instruments étranges et aux sonorités originales, un peu oubliées aujourd'hui.
Le premier instrument qu'il prend en main est le Tamoura. D'origine arabe, il a été importé en Europe au XIème siècle en passant par l'Espagne puis en France au XIIème siècle durant la croisade des albigeois. Le Tamoura, explique Alain, est un instrument atypique : bien qu'en partie adopté par la culture occitane, il a malgré tout été parfois rejeté car n'appartenant pas au terroir musical local. C'est de plus un instrument très difficile à accorder. Il en achète un exemplaire en mauvais état, le remet à neuf avec des cordes de guitare folk pour lui donner une consonnance plus actuelle et commence à en jouer. Très rapidement, il s'intéresse aussi aux autres instruments très ancrés dans la culture occitane.

Les instruments plus classiques de la musique occitane
La musique occitane, c'est aussi en effet une multitude d'instruments aux consonnances bien spécifiques.

Le Rebec d'abord, cet instrument à trois cordes espacées, au son plus fort que le Tamoura et qui date du XIIIème siècle. Comme la plupart des instruments médiévaux, il est constitué d'une seule pièce. C'est un instrument à archet avec un corps en forme de poire, largement utilisé par les jongleurs de l'époque médiévale. Sa sonorité a été conçue afin d'imiter les caractéristiques de la voix humaine. Il est généralement taillé dans un bloc de cerisier. La vièle à archet est apparue au XIIème siècle. Elle peut avoir, suivant le temps, plusieurs formes différentes : ronde ou carrée, avec ou sans échancrure pour laisser passer l'archet, possédant de deux à cinq cordes et réalisé dans du bois d'érable et d'épicéa. La citole, également en forme de poire, a quant à elle un fond plat, élaboré dans du bois d'érable, elle date du XIIème siècle. L'organistrum est le premier instrument à cordes doté d'une mécanique. Comme le Tamoura, il est d'origine orientale. Comme lui aussi, il arrive d'Espagne vers la fin du XIIème siècle. Son nom " organistrum ", vient de son origine : il a en effet été conçu pour accompagner des chants religieux appelés " organums ". Vièle à trois cordes, l'archet y est remplacé par une roue qui frotte sur ces cordes, pour obtenir un son et des notes continus. Deux personnes sont nécessaires pour en jouer, posé à plat verticalement sur leurs genoux, comme on peut souvent l'observer dans de nombreuses gravures d'époque. Il est réalisé dans un bois d'érable ou d'épicéa. Réalisée en érable, la guiterne est un petit instrument ressemblant à une petite guitare avec un fonds bombé. Elle date des XIIème et XIIIème siècles. La chiffonie enfin, ressemble à un petit organistrum mais une seule personne est nécessaire pour en jouer, portée en bandoulière.

Les troubadours, explique Alain, transmettaient les informations au travers de leur musique et de codes musicaux qui permettaient à la fois de transmettre un message tout en le rendant "acceptable" par le seigneur : la musique au service du message politique en quelques sortes. C'était ainsi pour certains la possibilité de s'alarmer et de crier leur injustice face au pouvoir centralisé du roi de France. Ces instruments s'ils ne sont plus utilisés aujourd'hui que dans les groupes de musique traditionnelle, n'en sont pas moins souvent familiers. On peut en effet les voir sur les gravures anciennes ou encore sculptés sur les bas reliefs de différents monuments.

Le retour en force des musiques anciennes (comme la musique celtique par exemple) pourrait bien redonner une nouvelle vigueur à ces sonorités venues d'un autre temps. Quelques groupes occitans perpétuent encore cette musique.
Alain invite toutes les personnes intéressées comme lui par la culture et la musique occitanes à le contacter pour partager cette passion.

 

Interview : Pascal RASSAT

Plus d'informations sur le site Internet http://www.ocmusic.org

 


Couleur Lauragais N°39 - février 2002