accueil
Couleur Lauragais : les journaux

Au fil de l'eau

" Autour du Grand Bassin de Castelnaudary "

Nouveau numéro de Couleur Lauragais, nouvelle visite qui guide aujourd'hui nos pas jusqu'au grand bassin de Castelnaudary. Histoire de ce haut lieu du canal, cher à tous les chauriens.


L'ECLUSE SAINT-ROCH
:

Péniche dans le grand bassin
Saint-Roch est l'unique exemple de quadruple écluse sur le canal. Seule l'écluse de Fonseranne, avec ses huit bassins, la surpasse.
Il y a nombre d'écluses tout au long du parcours, et Saint-Roch en est un "bon exemple" architectural. En effet, tous les bassins sont construits suivant le même modèle. Et si dans un premier temps on a privilégié la construction des écluses multiples à une succession d'écluses simples rapprochées, c'est dans un souci d'économie. Pour Saint-Roch, s'il y avait eu quatre bassins indépendants, il y aurait eu huit portes ; or, on n'en compte en fait que cinq. Il en va de même pour les ouvrages en maçonnerie : murs de défense, et murs de fuite. Sans compter le personnel, puisque un seul éclusier pouvait s'occuper d'une écluse multiple.
L'inconvénient, quant à la dépense d'eau, devait se révéler plus tard. Pour ce qui est de l'écluse Saint-Roch, le grand bassin constitue une réserve en eau plus que suffisante au bon fonctionnement de l'ouvrage.

LE PORT OU PETIT BASSIN :

De nombreux ports jalonnent le parcours du canal.
Le port de Castelnaudary, semblable à beaucoup d'autres, consiste en un élargissement de la cuvette. L'un des bords est aménagé en quai construit en pierre de taille. Quelques bittes d'amarrage sont disposées en bordure.
Au XIXe siècle, Castelnaudary compte le port, ou petit bassin, mais aussi les chantiers de radoub situés eux sur le grand bassin. La ville dispose ainsi de l'un des ports les plus importants du parcours du canal.

LE GRAND BASSIN :

Le grand bassin au XVIII° siècle
Bien que Colbert soit opposé au détour permettant de faire passer le canal à Castelnaudary, la demande effectuée par le diocèse de Saint-Papoul et la communauté chaurienne aboutit. La ville se charge des frais supplémentaires occasionnés par le changement de trajectoire.
Le port et le grand bassin forment un ensemble superbe. Les dimensions (environ 300 mètres sur 400) favorisent l'installation de chantiers de construction de barques (y compris pour la mer), de radoub*, et des magasins. Castelnaudary reste l'un des plus importants chantiers jusqu'au milieu du XIXe siècle, avant même Toulouse.
Mais ce superbe plan d'eau est très exposé à la violence des vents. Pour protéger les berges du vent d'Autan, on réalise un mur de revêtement. De même, à la sortie du port, après le pont, on crée l'île de la Cybelle que l'on agrémente de nombreux arbres. Les barques sont ainsi protégées lorsqu'elles suivent le chemin de halage au sud du bassin.
A chaque extrémité du grand bassin on trouve des ponts qui, avec les écluses, sont les ouvrages le plus répandus sur le canal. Construits pour remédier à l'interruption des voies de communication d'une part, et permettre l'accès aux terres riveraines d'autre part, les premiers ponts sont presque tous édifiés en bois, seuls quelques-uns sont en maçonnerie. Riquet fait même réaliser des ponts flottants. Ces constructions ne durent qu'un temps. Les défauts sont tels qu'on les démolit rapidement, pour revenir aux ponts traditionnels.
Tous les ponts en bois du XVIIe siècle ont aujourd'hui disparu. Certains de ceux construits en maçonnerie nous sont parvenus sans grands changements. On note une différence avec les édifices du XVIIIe siècle, reflets de l'élargissement des voies de communication. Les nouveaux ponts sont plus larges, leur voûte en arc est surbaissée. La construction est soignée et l'on utilise la pierre de taille.

LA PLACE DU GRAND BASSIN DANS LA CITE :

Image incontournable de la cité chaurienne, le grand bassin fait partie intégrante de son paysage.
Présent depuis plus de trois siècles au pied de la ville, il en est le miroir. Il a trouvé naturellement sa place au "pré de l'étang". On sait pourtant que le tracé originel du canal évitait Castelnaudary. Ce n'est qu'en 1670, alors que les travaux étaient déjà entamés, que la décision de dévier le cours du canal a été prise. La communauté ne devait pas regretter ce changement de trajectoire.
Près d'un siècle plus tard, en 1755, un plan, signé par Mr Serres, envisage la possibilité de supprimer le plan d'eau. Il n'aurait alors subsisté qu'un élargissement du lit. Fort heureusement, un autre projet a été retenu, avec l'aménagement du pourtour, et la création de l'île de la Cybelle protégeant les barques des vagues.

LES METIERS LIES A LA BATELLERIE :

Par le passé, l'activité autour du port et du grand bassin était intense. Les bâtiments construits sur le secteur pouvaient en témoigner.
Si dès le début de l'exploitation, il a été accordé à Riquet et à ses descendants l'exclusivité du transport des marchandises et des passagers (par barque de poste), ce monopole a été très restreint par la suite, et des bateliers indépendants se sont installés. Le commerce s'est alors grandement développé.
Castelnaudary compte dans ses rangs parmi les plus anciennes familles de bateliers avec de véritables dynasties : Caraman, Escargueil, Falcou, Espinasse, ou Maux, pour ne citer que quelques noms. Personnages les plus connus du canal, avec les éclusiers, il ne constituent pas la seule corporation.
Castelnaudary est un lieu de fabrication de barques, et bon nombre de charpentiers de marine y sont également installés. Il s'agit parfois d'anciens charpentiers, spécialisés dans les charpentes ou les pièces de charrettes, tout naturellement reconvertis dans les métiers liés à la batellerie.
Il y a aussi tous les employés du canal chargés de l'entretien des ouvrages (ponts, écluses, ...), dont les pièces en bois sont conservées dans les magasins comme ceux de Castelnaudary. Les cordiers exercent également leur métier en relation avec le canal, tout comme les hommes de peine et les lavandières.
Tout un monde, quantité de métiers, toute une foule donnant vie au canal.
Le grand bassin reste encore de nos jours un lieu privilégié. Après avoir connu une grande activité, il est devenu un lieu de détente, avec ses attractions (joutes ou feux d'artifice...), et constitue la promenade favorite des chauriens.

Françoise BOUSQUET (Castelnaudary)

* Radoub : bassin pour la réparation d'un navire.


Couleur Lauragais N°14 - Juillet/Août 1999