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Couleur Lauragais : les journaux

Au fil de l'eau

" Le Système d'Alimentation d'eau et Saint Ferréol "

Sur les pas de Riquet, aux sources du Canal - Sur les chemins des Rigoles, lacs, barrages et réservoirs d'alimentation du Canal du Midi.

Lorsque Pierre-Paul Riquet, dans les années 1650-1660, parcourait avec l'aide précieuse du fontainier de Revel, Pierre Campmas, les pentes et vallées de la montagne Noire pour y découvrir l'eau jaillissante des ruisseaux et rivières, il était loin de se douter que, trois siècles après, tout son système d'alimentation du futur canal, allait devenir un haut lieu touristique.
Quand il écrivait à Colbert, dans son mémoire du 15 novembre 1662, où il décrivait son projet de canal et surtout l'alimentation de celui-ci, Riquet était convaincu qu'il avait "trouvé l'eau à suffisance" (sic).

Les sources du canal
(crédit photo : J.Batigne)

En 1663, il effectue dans le versant méditerranéen de la Montagne Noire, des nivellements, des tracés et devis d'une rigole à flanc de montagne, pour capter les rivières et ruisseaux affluents du Fresquel, qui coule vers le carcassonais et se jette dans l'Aude à la sortie est de Carcassonne. En 1664, une commission d'experts des États du Languedoc modifiera légèrement le tracé initial de Riquet. Durant l'été de 1665, il fait creuser la première "rigole d'essai" et prouvera ainsi aux Commissaires du Roi le bien fondé de ce qu'il avait avancé, l'eau arrive bien à Naurouze, le point le plus haut du canal et de partage des eaux, en octobre 1665. 

Le premier des captages, il le fera sur l'Alzeau, au lieu-dit la Forge (tout près du village de Lacombe-Aude) à 660 mètres d'altitude et c'est là que nous pouvons véritablement parler "des sources du canal". De nos jours, nous trouvons en cet endroit un site majestueux avec une stèle élevée en 1837 par le Duc de Riquet de Caraman, retraçant toute l'histoire de la construction du Canal royal de Languedoc.

La petite maison du garde, les ouvrages de dérivation de la rivière et de départ de la Rigole dite de la montagne sont entourés de thuyas et épicéas géants, plusieurs fois centenaires.
Cette rigole a une largeur moyenne de 3 mètres et est doublée d'un chemin de service de même dimension. Nous suivrons celui-ci sous les frondaisons de la forêt de Ramondens et rencontrerons successivement les prises d'eau par des chaussées barrant les lits des ruisseaux et rivières de la Bernassonne, le Lampy et le Rieutort, également affluents du Fresquel. Après avoir parcouru une douzaine de kilomètres, nous arrivons au barrage du Lampy Neuf. Ce réservoir supplémentaire d'alimentation a été construit en 1782. D'une contenance de 1 760 000 mètres cubes, il a une superficie de 40 ha, il est enserré dans un écrin de verdure et propose un lieu privilégié de calme et de fraîcheur. Cheminant sur le chemin de halage de notre rigole, nous rencontrons à 6 kilomètres, un poste important, au lieu-dit Le Conquet. À cet endroit, c'est par une tranchée du même nom, creusée au faîte de la montagne, que les eaux vont changer de bassin versant. Là, il y a une dérivation et une régulation des eaux de la rigole ; soit elles se déversent en partie ou totalité dans la vallée du Sor (rivière affluent de l'Agoût qui coule vers Revel) soit elles continuent par la rigole vers le village des Cammazes et la vallée du Laudot, ceci étant rendu possible par un magnifique ouvrage (6 km plus loin) construit par Vauban en 1687, un tunnel ou aqueduc souterrain d'une longueur de 123 mètres, qui passe sous le village, c'est la "percée des Cammazes".

Auparavant, en amont, au lieu-dit le Plô de la Jasse, nous avons surpomblé un immense barrage moderne, celui de la Gravette construit en 1955, sur la vallée du Sor. D'une superficie de 90 ha, il contient une réserve d'eau de 19 millions de mètres cubes destinés à l'irrigation agricole et à l'eau potable de consommation.

Lac de Saint Ferréol
(crédit photo : D. Estève)

Notre cheminement s'étant arrêté à la sortie de la voûte de Vauban, nous sommes contraints d'emprunter un autre sentier de randonnées (1) ou la route D-629 qui va de Revel à Carcassonne par la Montagne Noire. Ceci pour rejoindre à 7 km, l'ouvrage le plus important et le plus remarquable dans son genre, construit au XVIIème siècle. Il s'agit du barrage d'alimentation du Canal, le réservoir principal ou "magasin d'eau", comme le disait Riquet, de Saint Ferréol, ancré dans la vallée du Loudot.

Ce lac artificiel entouré de milliers d'arbres est agrémenté d'un parc où se côtoient conifères et feuillus de toutes essences. Des allées promenades permettent d'apprécier l'eau jaillissante des cascades et jet d'eau, dans ces sous-bois. Sur ce magnifique plan d'eau, toutes les activités nautiques sont pratiquées (excepté les bateaux à moteur). Ces atouts font aujourd'hui de Saint Ferréol avec ses campings, son hôtellerie et ses restaurants, un haut lieu du tourisme estival (2).

J. BATIGNE

 


(1) Une variante du sentier "G.R.7", le sentier de randonnée baptisé "boucle Pierre Paul Riquet" et balisé en rouge / blanc.
(2) Renseignements :
Office du tourisme des Cammazes (05 63 74 17 17) .

Office du tourisme de Revel-Saint Férreol (05 34 66 67 68).

Couleur Lauragais N°4 - Juillet-Août 1998