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Couleur Lauragais : les journaux

Au fil du ciel

Découverte d'astéroïdes à Bélesta en Lauragais

Dans le numéro 50 (mars 2003)* de Couleur Lauragais, nous avions évoqué la construction d’un observatoire à Bélesta (31) près de Saint Félix Lauragais par une équipe de 5 astronomes amateurs. L’hiver dernier, ils se sont lancés dans la recherche d’astéroïdes dans le but de faire progresser et de mieux connaître l’environnement de la terre dans le système solaire.

Qu'est-ce qu'un astéroïde ?
Les astéroïdes sont de petites planètes qui tournent autour du Soleil, la plupart évoluant entre les orbites de Mars et de Jupiter. Leur taille va de quelques kilomètres à quelques centaines de kilomètres de diamètre ; plus ils sont petits, plus ils sont nombreux. Ce n'est qu'en 1801 qu'a été découvert le premier astéroïde, mais grâce aux progrès techniques, les découvertes se sont multipliées de façon exponentielle à partir de la fin du XXème siècle : on a actuellement répertorié plusieurs centaines de milliers d'astéroïdes.

L'observatoire de Bélesta
L'observatoire de Bélesta en Lauragais

Découvrir un astéroïde
Plusieurs observatoires professionnels américains sont spécialisés dans la recherche systématique d'astéroïdes. Equipés de gros télescopes automatisés, et installés dans des régions où le ciel est souvent dégagé et sans pollution lumineuse, ils font des moissons impressionnantes de découvertes. On peut considérer aujourd'hui que tous les astéroïdes relativement brillants sont connus, mais il reste encore beaucoup de découvertes possibles parmi les astéroïdes plus faibles car plus petits : les plus brillants des astéroïdes restant à découvrir sont à peine 1 million de fois moins lumineux que les plus faibles étoiles visibles à l'œil nu …

Télescope de Bélesta
Le télescope de 82 cm de diamètre de
l'observatoire de Bélesta
La technique de chasse aux astéroïdes
Pour pouvoir découvrir un astéroïde inconnu, il faut un gros télescope, un ciel non pollué par les éclairages urbains, une bonne méthode de recherche, et de la persévérance.
Lorsque le télescope prend une image du ciel, le champ couvert est tout petit, comparable à la surface apparente de la pleine lune ; il faudrait faire environ 150 000 images de cette taille pour couvrir tout le ciel. Mais sur un champ aussi petit, apparaissent des milliers d'étoiles. Si un astéroïde se trouve dans le champ de la photo, il apparait comme un point lumineux exactement semblable aux étoiles. Mais alors que les étoiles sont fixes par rapport au ciel, l'astéroïde se déplace lentement : si le télescope prend plusieurs images de la même région du ciel, espacées d'une heure environ, on peut voir que l'astéroïde bouge par rapport aux étoiles d'une image à l'autre.
La chasse aux astéroïdes consiste donc à prendre plusieurs images du même champ au cours d'une même nuit, puis à chercher si l'un des milliers de petits points lumineux enregistrés s'est déplacé d'une image à l'autre. Lorsqu'un astéroïde est ainsi identifié, on mesure sa position exacte, puis on consulte la base de données du "Minor Planet Centre" (MPC) de l'Union Astronomique Internationale pour savoir si c'est un astéroïde déjà connu ou non.
S'il n'y a pas d'astéroïde déjà connu présent sur la position mesurée, c'est une découverte potentielle ; il faut alors calculer la position qu'il occupera dans les nuits suivantes, et le retrouver lors d'une deuxième séance d'observation, toujours par la même méthode, en cherchant le petit point qui s'est déplacé d'une image à l'autre.
Si l'astéroïde est retrouvé, les mesures de position des deux nuits sont envoyées au MPC ; en effet, le MPC n'accepte comme découverte que les astéroïdes qui ont pu être observés sur au moins deux nuits différentes. Si la découverte est confirmée par le MPC, celui-ci attribue une dénomination à l'astéroïde et publie ses positions.

Les astéroïdes de Bélesta
Il y a moins d'une dizaine d'observatoires en France qui se voient ainsi attribuer des découvertes d'astéroïdes. L'hiver dernier, l'observatoire de Bélesta en Lauragais est entré dans ce club très fermé. Une campagne de chasse aux astéroïdes a été menée de septembre 2007 à avril 2008 pas les astronomes amateurs qui exploitent cet observatoire. Cette campagne a permis de trouver 7 nouveaux astéroïdes qui ont été homologués par le MPC. D'autres astéroïdes inconnus ont été détectés sur une nuit seulement ; mais les mauvaises conditions météorologiques (et parfois le manque de disponibilité des bénévoles) n'ont pas permis d'enchaîner une deuxième nuit d'observation avant que l'astéroïde ne se perde dans l'immensité du ciel.
Les 7 astéroïdes de Bélesta seront à nouveau observables l'hiver prochain ; l'observatoire essaiera de les retrouver, ce qui permettrait d'améliorer la connaissance de leurs orbites. Ce sera aussi l'occasion de chercher de nouveaux astéroïdes.
asteroïde 3a
astéroïde 3b
Les images de la découverte
de l'astéroïde "2008CL22" faites avec
le télescope de 82 cm de
l'observatoire de Bélesta.
Ces 3 photos ont été prises la même nuit
à une heure d'intervalle.
L'astéroïde est repéré opar une flèche
on voit bien son déplacement d'une photo à une autre. Tous les autres points sont des étoiles.
on a reproduit ici seulement une toute
petite région de l'image originale.
astéroïde 3c

Alerte à la pollution lumineuse
Un facteur essentiel pour pouvoir détecter des astéroïdes aussi faibles que ceux qui restent à découvrir est la noirceur de ciel au-dessus de l'observatoire ; par exemple, il n'est pas possible de chercher des astéroïdes en présence de la lune, car son éclairage du ciel nocturne suffit à les masquer.
Mais le grand fléau actuel est l'éclairage urbain artificiel : il est désormais impossible de faire la moindre découverte à proximité d'une ville, et c'est la raison pour laquelle l'observatoire de Bélesta a été installé au milieu du Lauragais, le plus loin possible des agglomérations importantes. Cependant, l'urbanisation des campagnes et les éclairages qui l'accompagnent dégradent chaque année la qualité du ciel, au point que la chasse aux astéroïdes sera bientôt compromise même à Bélesta. Pourtant, la solution est simple : l'éclairage "utile", celui qui est procuré par un lampadaire dont l'abat-jour envoie toute la lumière vers le sol, en-dessous de l'horizontale, ne dégrade pas la qualité du ciel. Le problème vient des lampadaires en forme de boule, ou munis d'une ampoule si basse par rapport à son abat-jour qu'elle éclaire en grand partie vers le haut : ce genre d'éclairage nuit à l'astronomie, mais aussi gaspille l'énergie puisque la lumière nuisible envoyée vers le haut ne sert à personne. Nous invitons vivement les responsables de l'éclairage de nos communes à prendre en compte cette petite réflexion…

Association ADAGIO
Patrick MARTINEZ

ADAGIO : Association pour le Développement Amateur d’un Grand Instrument d’Observation
www.astrosurf.com/adagio
*Couleur Lauragais N° 50 : www.couleur-lauragais.fr/pages/ journaux/2003/cl50/belesta.htm

Crédit photos : Association ADAGIO

Couleur Lauragais n°105 - Septembre 2008