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Couleur Lauragais : les journaux

BALADE EN LAURAGAIS

Balades dans la Montagne Noire Lauragaise et au delà

Couleur Lauragais vous présente une série de 4 circuits de découverte dans la Montagne Noire, de Revel au Pic de Nore (1210 m). Chacun d'eux étant liés à un thème, ils vous conduiront hors des limites du Lauragais historique.

Roquefort
Roquefort a conservé sa porte romane,
devenue le vestige d'un castrum cathare oublié

Le cadre naturel : une vieille montagne et des plateaux calcaires
La Montagne Noire est la partie méridionale du Massif Central. Elle doit son nom aux épaisses forêts qui la couvrent. Elle domine de plusieurs centaines de mètres les plaines et les cuvettes qui l’enserrent. La zone centrale s’élève progressivement de l’Ouest vers l’Est, jusqu’au sommet du Pic de Nore. Cette montagne ancienne (primaire) a été aplanie et reprise, à l’ère tertiaire, lors de la formation des Pyrénées et des Alpes. Elle est alors cassée et faillée. Un basculement du bloc vers le Sud offre une dissymétrie spectaculaire entre versant Nord et Sud. Au Nord la montagne domine la ligne Revel-Sorèze-Mazamet, de plusieurs centaines de mètres. L’altitude de Revel est de 220 m, les Cammazes sont à 600 m, la Régine à 650 m, Mazamet à 230 m, le Pic de Nore à 1210 m. Les rivières s’y encaissent profondément comme le Sor qui creuse un véritable trait de scie, avec des cascades comme celle de Malamort. Le versant Sud, ou pénéplaine du Cabardès descend doucement vers le Fresquel avec des vallées fortement creusées comme celles de l’Alzeau, du Lampy, du Rieutort, la Bernassonne, le Tenten. La Montagne Noire est un véritable château d’eau avec des pluies très abondantes, leur hauteur annuelle est de 700 mm à Revel, 900 à Saint Ferréol, 1500 au Pic de Nore.
Au delà de la Montagne Noire, vers l’Est, au Nord de Carcassonne s’étend un monde très différent de collines, de plateaux calcaires dans la région de Cabaret et jusqu’en Minervois.

Circuit A : A la découverte de la partie Nord de la Montagne Noire
Le départ se fait de Revel, très belle bastide de 1346 avec sa place centrale, sa halle et son beffroi, ses couverts. Prendre la route de Castres, Soual. A Labruguière, tourner à droite, prendre la D 56 qui nous conduit à Fontbruno et son énorme Croix de Lorraine. L’ossuaire est le témoignage tragique des combats de juillet-août 1944 entre Le Corps Franc de la Montagne Noire et les troupes allemandes. Dans l’ossuaire, il faut remarquer les cercueils catholiques, musulmans et juifs.
L’action du Corps Franc fut brillante, mais un demi-succès (lire l'article de Jean Odol, "Le maquis dans la Montagne Noire-1944", Couleur Lauragais n°67, novembre 2004)

Fontbruno memorial de la résistance
Le Mémorial de la Résistance, la crypte et l'ossuaire de Fontbruno y rappellent la présence et
les combats du Corps Franc de la Montagne Noire durant l'occupation allemande

De Fontbruno, par une splendide route forestière, nous atteignons le lac de la Galaube, site splendide. A 500 m, vers le Sud Est, la Prise d’Alzeau est le point de départ de la Rigole de la Montagne dont les eaux alimentent, à Naurouze, le Canal du Midi. C’est Riquet qui eut l’idée géniale de capter les eaux des torrents de la Montagne Noire (Alzeau, Bernassonne, Lampy, Rieutort) pour les conduire dans le réservoir de Saint Ferréol.
Au retour de notre balade, nous allons au Conquet admirer la très célèbre "tranchée" par laquelle les eaux transportées par la Rigole quittent le bassin versant méditerranéen pour s’engager vers le versant atlantique du Sor tout d’abord, puis vers les Cammazes et Saint Ferréol-Naurouze. Le Conquet est le point stratégique qui commande l’alimentation du Canal du Midi. Aux Cammazes, c’est Vauban qui a construit la "voûte" (sorte de tunnel) dans laquelle se glisse la Rigole.

Circuit B : Arbres et forêts de la Montagne Noire
Le point de départ peut être St Orens ou Castanet en étudiant le contraste brutal entre les paysages découverts des collines de Lanta, Caraman ou Baziège, St Félix, et l’océan forestier qui couvre la Montagne Noire. Ces forêts ont pour noms forêt de Crabes Mortes, de l’Aiguille, de la Loubatière (domaine des loups, qui ont disparu vers 1880), de la Montagne Noire. La plus célèbre est certainement celle de Ramondens, drainée par l’Alzeau qui a appartenu pendant des siècles à l’abbaye de Prouille, cette dernière située au pied de la colline de Fanjeaux (fondée par St Dominique en 1206). Prouille avait mis en place une importante grange où étaient exploités du bois de la forêt, du minerai de fer, des forges et surtout élevage des moutons ; ils y élevaient surtout des boeufs de travail pour les autres granges de l’abbaye.
Il faut se promener dans la région d’Arfons, écouter le silence, au milieu des hêtres, des châtaigniers, des sapins, voir des biches, emprunter les routes qui vont d’Arfons à Saissac, d’Arfons à Dourgne, d’Arfons à la Galaube, de Laprade à Labruguière, ou encore d’Arfons à Massaguel et Dourgne, encore des Cammazes à Durfort (spécialisé dans le travail du cuivre).
Sur le versant Sud, il faut emprunter les routes de Labécède à Verdun-Lauragais. Au Sud de Saissac, on découvre l’abbaye cistercienne de Villelongue et le village de Montolieu, c’est à dire la colline aux oliviers, limite climatique de ces arbres (olieu, en occitan = olivier).

Abbaye de Villelongue
L'abbaye de Villelongue fut récompensée pour sa prise de position contre les cathares,
elle devint alors puissante et riche

Circuit C : Sur les pas de Riquet et de Vauban
Riquet et Vauban sont associés car ce dernier a joué un grand rôle dans les travaux de sauvetage du Canal en 1686-1695. Son oeuvre sera classée au Patrimoine Mondial de l’Humanité par l’UNESCO (Nations Unis pour l’Education, la Science et la Culture) en 2007-2008.
Vauban, maréchal de Louix XIV, a construit 49 aqueducs, exhaussé la digue de Saint Ferréol de plusieurs mètres et augmentant ainsi le volume de la retenue de 5 à 6 millions de m3. Il a encore fixé le tracé de la jonction du Canal à la Robine de Narbonne (les travaux seront effectués vers 1780). En Lauragais, c’est l’aqueduc de Villefranche, au lieu-dit "les Voûtes" qui est le plus important en permettant le passage de l’Hers mort.
Pour découvrir quelques travaux de Riquet dans la Montagne Noire, on doit se transporter à la Galaube et rechercher les traces de la Rigole d’essai (1665). Pour fournir la preuve de ses hypothèses, Riquet fut dans l’obligation de construire une petite rigole de 60 cm de large, 30 de profondeur, depuis l’Alzeau jusqu’à Naurouze. Ce canalet a pratiquement disparu, cependant des chercheurs passionnés ont localisé quelques traces du côté de la Galaube, à l’Ouest du pont sur l’Alzeau. La prise d’Alzeau où débute la Rigole de la Montagne est à 500 mètres au Sud du hameau de la Galaube. Le barrage actuel est moderne, celui de Riquet était composé de poutres superposées que l’on empilait, ou abaissait, selon les besoins de la déviation.
Pour étudier la Rigole de la Plaine, il faut se rendre à Pont Crouzet (5 km en amont de Revel) où l’on "vole" les eaux du Sor. Il faut compléter ce système de rigoles par la visite des lacs qui gravitent autour de Naurouze, le Lampy (construit vers 1780 au Nord de Saissac, Saint Ferréol, et au Sud : la Ganguise avec des travaux très récents (2004) qui portent le volume de la retenue de 22 à 44 millions de m3. Des conduites souterraines et des stations de pompage relient ces lacs à Naurouze.
Pour finir, allez à Montbel (département de l’Ariège), à hauteur de Chalabre, où un immense lac (400 hectares) emmagasine 60 millions de m3 d’eau prise à l’Hers vif près de Sainte Colombe.

Le lac de la Ganguise
Le lac de la Ganguise attire les pêcheurs, les randonneurs et les sportifs et est aussi une base de loisirs départementale utilisée pour la pratique de la voile et la planche à voile

Circuit D : Les forteresses Cathares de Roquefort à Minerve
Une série de châteaux en ruines témoignent de l’imprégnation de la religon cathare dans la Montagne Noire, le Cabardès et dans le Minervois. Ces vestiges prestigieux s’appellent Roquefort, Saissac, Haut-poul, Cabaret (5 châteaux), Minerve.
À Roquefort de la Montagne Noire, le donjon s’aperçoit depuis la route qui descend des Cammazes jusqu’à Durfort. Son accès est très difficile en traversant le Sor à gué (il se situe dans une propriété privée). Une puissante famille cathare a régné ici au XIIIe siècle, dominant la région de Revel et Castelnaudary. Un des chefs de cette famille, Jourdain, a été inhumé dans le cloître de l’abbaye de Saint Papoul vers 1230-1240. Le château devenu repaire de brigands pillards est détruit à la poudre vers 1422, ce qui explique la modestie des ruines. Cependant subsistent une très belle porte d’entrée du castrum, un donjon éventré, des fonds de cabanes, avec un silo, des murs dont certains sont au mortier, d’autres en pierres sèches.
Saissac domine le Saissaguès. Ce fut un centre d’ateliers textiles important au XIXe siècle. Mais au XIIIe, le château était un puissant centre cathare aux mains d’une famille fortement engagée dans l’hérésie. En 1209, Bertrand de Saissac recueille le fils de Raimon Trencavel, le comte de Carcas-sonne, assassiné par Simon de Montfort. La forteresse tombera ensuite aux mains des Croisés. Les ruines du château (sans doute du XIVe siècle) dominent la confluence triangulaire de la Bernassonne et de l’Aiguebelle. Le village est très intéressant avec ses venelles et les riches maisons des marchands du textile. Depuis les tours de l’enceinte, le panorama est sublime, avec les Pyrénées à l’arrière-plan.
Le château de Hautpoul, au-dessus de Mazamet, est très difficile d’accès. Dans les ruines, on distingue une très belle fenêtre.
Cabaret (à Lastours dans l'Aude) abrite la base des murs de la forteresse cathare des XIIe et XIIIe siècles. Les seigneurs du lieu ne se seraient rendus que vers 1225-30. Les restes sont impressionnants. De Cabaret on peut se rendre directement à Minerve dans l'Hérault, haut lieu cathare le plus connu et le plus visité du Midi de la France après Montségur.

Carte des circuits

Jean ODOL

Bibliographie :
Corinne Labat : "Le canal du Midi" - Empreintes - novembre 2006
Jean Odol : "L’abbaye de Saint Papoul" - 1996
André Bonnery : "Le maître de Cabestany" Zodiaque - 2000
Editions du Zodiaque : "L’art cistercien" - 2 tomes

Couleur Lauragais n°92 - Mai 2007