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Couleur Lauragais : les journaux
" Balade du côté de Castelnaudary "

Castelnaudary a une histoire particulièrement longue. 2000 ans avec des périodes d'exceptionnelle prospérité que nous avons déjà évoquées dans ce journal : le siècle d'or du pastel (1463-1562) ou les siècles du froment (XVIII et XIXème) alors que le port au blé sur le canal est le premier centre d'exportation des grains de Toulouse à Sète. Mais son histoire commence beaucoup plus tôt.


Les origines de la ville

Sostomagus est le nom gallo-romain de l'agglomération de Castelnaudary, centre commercial, sur la prestigieuse voie romaine d'Aquitaine reliant Narbonne à Toulouse. Les Romains ont établi leur domination dans la région en 118 avant Jésus Christ en s'établissant d'abord à Narbonne puis en installant une garnison à Toulouse. Les autres centres urbains importants dans la région sont alors Badera (Baziège), Elusiodunium (Montferrand) et Eburomagus (Bram).
C'est Catherine de Médicis, comtesse du Lauragais par sa mère Madeleine, qui dota Castel du siège d'une sénéchaussée avec un présidial et qui donna ainsi à la ville son rang de capitale du Lauragais. Aujourd'hui, elle est avec ses 13 000 habitants la ville la plus peuplée du Lauragais (devant Castanet : 11 000, Revel : 8500, Auterive : 6000, Escalquens : 6000 ou Villefranche : 3500).

La clef de la Porte d'Aquitaine

Lorsqu'on vient de Carcassonne, la ville s'aperçoit de très loin, comme un point élevé au dessus de basses terres. On fait souvent référence à un couloir, entre les hauteurs de la Montagne Noire et celles des collines de la Piège ; dans le détail, c'est cependant inexact. Le couloir existe réellement entre le seuil de Naurouze et Castanet où l'on a une gouttière encadrée par des failles (cassures). Mais au delà de Naurouze (190 mètres), en suivant la RN 113, on monte légèrement (218 mètres au Présidial). On suit ici une longue échine de terrains (une serre), qui s'étire sur 15 km et qui sépare le bassin versant du Fresquel de celui du Tréboul. À l'extrémité orientale de cette serre, un pointement de grès de la molasse domine les plaines voisines de 50 mètres environ. Sur ce chicot rocheux s'établit le castrum (un village plus un château) qui fait de Castelnaudary la clef du seuil de Naurouze ou « Porte d'Aquitaine ». Vers l'Ouest, le verrou est triple : les deux castra de Montferrand et d'Avignonet et la bastide royale de Villefranche.


La bataille de Castelnaudary Saint Martin Lalande - 1211 :

L'histoire de Castelnaudary a été marquée par les célèbres combats de 1211, longuement étudiés par Guillaume de Tudèle dans la Chanson de la Croisade contre les cathares. En 1211, le Lauragais est encore la forteresse du catharisme occitan. C'est ici, à Saint Félix, que sont nés les quatre évêchés cathares d'Albi, Carcassonne, Toulouse et Agen. C'est toujours ici, à Fanjeaux, que St Dominique a fondé Prouille en 1206 pour accueillir des moniales dominicaines. Toute la noblesse du pays est cathare, comme la grande famille des Laurac qui se fait inhumer à Pexiora mais aussi comme les Roqueville, les Hunaud de Lanta, les Jourdain de Saissac, et Jourdain de Roquefort (qui a d'ailleurs sa tombe dans l'abbaye bénédictine de St Papoul). Les Croisés, dès 1209, s'installent à Fanjeaux et font la conquête du Lauragais. En 1213, ils sont au Pujol, à 13 km de Toulouse. Mais en 1211, l'année terrible, les Toulousains lancent une spectaculaire contre offensive pour essayer de rejeter l'envahisseur. 1211, c'est cette même année qu'eut lieu le siège et le bûcher de Lavaur, la victoire de Montgey mais aussi le bûcher des Cassés, la prise du castrum de Montferrand, et la bataille de Castelnaudary en automne. À l'époque des « raisins mûrs » (citation de la chanson de la Croisade), le comte de Toulouse Raimon VI, le comte de Foix, le comte de Comminges, des routiers et la milice toulousaine se mettent en marche en direction de Castel où Simon de Montfort s'est enfermé dans le château. L'armée de Raimon VI s'installe sur la colline du Pech, entoure son camp de palissades et attend.

Simon de Montfort a seulement avec lui une poignée de chevaliers (une centaine ?) et demande des renforts. Un convoi de ravitaillement arrive depuis Carcassonne. Il est attaqué par le Comte de Foix, et ses hommes pillent les chariots. Simon de Montfort en profite pour sortir du château avec une soixantaine de chevaliers, attaque et met en déroute le comte de Foix. Pour quelques jambons, ce fut la défaite inattendue des ariégeois. Raimon VI, lui, n'a pas bougé et ne participera pas aux combats! La bataille de Castelnaudary est très intéressante car c'est le prélude de la bataille catastrophe de Muret qui a lieu en septembre 1213.

Les faiblesses des Occitans sont évidentes : pas d'unité de commandement et la passivité inexplicable de Raimon VI. Malgré l'énorme supériorité numérique des Occitans, à Muret, à 1 contre 100, Simon de Montfort sera à nouveau vainqueur.


Autour du Présidial

Le présidial

Il faut aujourd'hui se promener dans le quartier si pittoresque des vieilles rues autour du Présidial ou sur la colline du Pech, admirer la façade Sud du musée, de type Renaissance (XVIème ou écrivons plutôt de la belle époque du pastel). Les rues devenues des escaliers, les paysages lointains que l'on découvre, les Pyrénées, le Saint Barthélémy (donc Montségur), le Bugarach, la Montagne Noire.
Castelnaudary et ses moulins, quel roman ! On peut tout d'abord imaginer les moulins pasteliers du XVIème siècle dans le quartier de la Baffe. Les moulins fariniers y furent également particulièrement nombreux. En 1520, on en comptait 22 dont 14 au Pech : « ils ressemblent à des oiseaux géants arrêtés sur la terre avec des ailes clouées dans le ciel » ( Prosper Estieu). De 1700 à 1800, il y aurait 32 moulins autour de Castel. Il n'en reste aujourd'hui qu'un seul : celui de Cugarel, fort bien restauré à l'identique de ce qu'il était en 1962, notamment à l'intérieur où le mécanisme et les meules sont des pièces d'origine. Cugarel est le symbole de la puissance économique de Castel et du Lauragais, puissance fondée sur le blé et qui perdure encore aujourd'hui, avec l'énorme coopérative du GCO (ancienne CAL).

Moulin de Cugarel

Auprès du Présidial, mentionnons seulement la magnifique collégiale à laquelle nous consacrerons une prochaine étude. De fort loin on aperçoit sa silhouette gothique qui est l'un des quatre symboles qui dominent visuellement Castel : le Présidial, c'est la vie politique (du passé) ; le moulin de Cugarel, la vie économique ; la collégiale, la vie spirituelle ; la cassole (du réservoir), la vie gastronomique.

Une ville complète qui mérite vraiment le détour !

 

Jean ODOL

 

Couleur Lauragais N°10 - Mars 1999